« Au fil des mots », festival éclectique et festif pour tous !

Interview de Franck dit Bart alias La Singette Missdinguette paru le 7/05/2013 sur Le Mague :

Entourée par toute son équipe, Virginie Dumas Coulon, directrice de ce fameux festival du 22 au 26 mai au Cœur du Médoc et de Lesparre, nous livre dans cette interview sa vision enthousiaste et si communicative. L’esprit à la lettre autour du spectacle vivant dans toutes ses représentations participatives (musique, théâtre de rue, danse, conte, rencontres littéraires…) sur le mode de la gratuité et du grand partage entre les villages ne tarit jamais cet éloge à la joie de vivre et à la création. Au joli mois de mai fais ce qu’il te plait, un nouvel âge d’or. Ce festival vous tend les bras, alors pourquoi s’en priver, vous auriez tort !

Le Mague : Virginie Dumas Coulon, vous êtes directrice du festival Au fil des mots. Depuis quand êtes-vous installée à Lesparre à la culture et quel a été votre parcours personnel ?

Virginie Dumas Coulon : Après différentes expériences bénévoles et professionnelles dans l’animation, j’ai suivi des études et obtenu un DUT Animation ainsi qu’une Licence. A cette occasion, j’ai (re)découvert la pédagogie active et j’ai choisi de faire un métier qui met en œuvre les principes d’éducation populaire. Mon aventure avec l’association du Centre Culturel de Lesparre a commencé fin 2005. J’ai été recrutée pour soutenir le travail des bénévoles et développer l’action culturelle sur le territoire. Avec mon mari, lui aussi animateur socioculturel, nous avons très rapidement choisi d’habiter Lesparre pour nous impliquer au mieux et vivre ce Médoc encore inconnu. Directrice de l’association du Centre Culturel, je m’occupe depuis de la coordination des ateliers de pratiques artistiques (danse, théâtre, peinture,…) et de l’organisation des animations et spectacles de la saison dont le festival Au Fil des Mots est le plus GROS morceau !

Le Mague : Au fil des mots a déjà cinq ans…. Comment est né ce festival ?

Virginie Dumas Coulon : Il est même un peu plus vieux que ça… Il est né en 2007 d’un partenariat avec la Bibliothèque Cœur Médoc et l’association du Centre Culturel. L’idée initiale étant de mutualiser nos petits moyens pour organiser un temps culturel et festif gratuit autour des livres, de la lecture, des mots… dans différentes communes du Cœur Médoc.

Le Mague : Quel est son évolution ?

Virginie Dumas Coulon : Chaotique ! C’est un festival en perpétuelle (re)(dé)construction… Devant l’ampleur du travail nécessaire pour la première édition, en 2007, nous convenons d’abord que le festival aura lieu tous les deux ans. Et puis, la responsable de la Bibliothèque choisit de ne plus participer à l’organisation du festival. En 2009, je me retrouve donc seule à organiser le festival et la CDC qui subventionne intégralement le festival, m’annonce un budget à 0€ à quelques mois de l’ouverture… Par solidarité, la plupart des artistes programmés baissent alors leurs cachets de moitié et particulièrement la Fatal Cie qui deviendra d’ailleurs une compagne fidèle du festival. Quelques communes soutiennent financièrement l’association et je trouve un sponsor…la 2ème édition peut avoir lieu ! Le ton est résolument donné, le festival Au Fil des Mots est le festival de multiples expressions : théâtre de rue, conte, chanson, exposition,… pour dire et faire vivre les mots. Année de budget plus serein, 2011 voit fleurir une belle édition intercommunale qui ne demande qu’à se développer et commence à convaincre. Les habitants se mobilisent de plus en plus nombreux autour d’une programmation un peu plus « léchée » chaque année (et j’en suis fière). Les décideurs financiers sont eux aussi convaincus et on « annualise » enfin le festival ! Teddy Pichou, intermittent, devient le régisseur technique du festival et quelques bénévoles intègrent la petite équipe pour m’accompagner aux manettes.

La 4ème édition, en 2012, est construite avec l’aide d’un nouveau partenaire, l’éditrice Delphine Montalant. Le choix des intervenants se fait plus pointu et permet de développer les projets transversaux tout au long de l’année, en particulier avec des élèves. Quelques habitants par ci par là et 2 ou 3 associations communales s’impliquent et participent à l’organisation. Au Fil des Mots garde le cap : Un festival itinérant de spectacles vivants, de rencontres et de repas de villages ! Et puis cette 5ème édition 2013 encore en construction à 2 semaines du lancement… Des partenariats qui se consolident ou qui se construisent autour de projets toujours nouveaux… La sauce prend… On y travaille… On organise les derniers ateliers participatifs… On ajuste la technique… On distribue les programmes… Ça mijote et on vous promet de bien beaux spectacles !

Le Mague : Durant une semaine à Lesparre et dans les villages à l’entour, des personnes alertes et joyeuses vont animer ce festival. Vous pouvez nous parler de la richesse et la diversité de tous ces artistes beaux phraseurs et selon quels critères les avez-vous choisis ?

Virginie Dumas Coulon : Le festival se veut pluridisciplinaire car théâtre de rue, musique, danse, conte, rencontres littéraires,… sont autant de formes d’expression au service du mot. La programmation doit être éclectique et s’adapter à tous les publics pour proposer des temps festifs en famille. Pour avoir des idées et voir des propositions, j’active mon petit réseau, je demande conseil, je vais voir des spectacles, je trie les nombreuses propositions qu’on reçoit au centre culturel,… Par exemple, à la dernière « Echappée Belle » de Blanquefort, j’ai eu le plaisir de découvrir Joane de la Cie Mine de Rien, de Genève, qui propose une Blanche Neige et une Cendrillon quelque peu moderne et tout terrain ! Deux spectacles participatifs que j’ai le grand plaisir d’accueillir pendant cette 5ème édition. Mais aussi aux « Festarts » de Libourne, où j’ai eu l’occasion de découvrir la Fatal Cie et sa Messagerie Tarabuste déjantée qui propose des arts du cirque au service des mots ou bien encore la Cie Rue Barrée avec un « Mario » tendre et facétieux.

J’aime le spectacle vivant et suis particulièrement attirée par le pep’s du théâtre de rue, qui, par sa grande proximité, embarque chacun dans l’imaginaire et la réflexion de(s) l’artiste(s) et permet facilement l’échange. Le partenariat avec l’éditrice Delphine Montalant nous permet aussi d’organiser des rencontres littéraires avec des auteurs et illustrateurs avec par exemple la venue de Manon Moreau pour son nouvel ouvrage « Suzanne aux yeux noirs » qui a reçu quelques jolis prix la saison dernière avec son premier roman « Le vestibule des causes perdues ». Je cherche à programmer des animations et spectacles plutôt drôles, intelligents, parfois incisifs qui feront le plaisir du plus grand nombre. Il y a aussi des contraintes financières et techniques à prendre en compte. Les budgets sont certes en hausse mais restent limités, il faut sans cesse faire du système D et trouver de nouvelles subventions. L’itinérance du festival et des salles pas adaptées obligent à des formes de spectacles relativement légères. J’espère que cette 5ème programmation éclectique mais de qualité, la proximité avec les artistes, les repas de villages et les nombreuses animations favoriseront la rencontre et l’échange.

Le Mague : Le festival nous met en appétit dès le 17 mai en guise de mise en bouche à la Bouquinerie, chez Delphine Montalant et Eric Holder. C’est un lieu magique que nous soutenons au Mague. Etonnant non, ce choix de votre part ?

 
Virginie Dumas Coulon : C’est en effet un lieu magique qu’il faut savoir trouver. Delphine Montalant et Eric Holder ont répondu présents dès la 1ère édition du festival. Au fil des années, ces passionnés des livres ont apporté de nombreuses propositions et la complémentarité de nos envies et réseaux a certainement enrichi la programmation. Bien que la commune de Queyrac ne fasse pas partie de la CDC (Communauté de communes), Cœur Médoc, j’ai souhaité proposer une soirée à la Bouquinerie cette année, renforçant un partenariat bien sympa. Une mise en bouche du festival aura donc lieu le vendredi 17 mai à partir de 18h30 à la Bouquinerie avec l’auteure Manon Moreau, le spectaculaire Mathieu Moustache et un concert de chansons par David Nègre et sa bande. Bref, une soirée culturelle et festive pour débuter cette édition et les jolies soirées organisées par Delphine et Eric tout au long de l’été… le début d’une belle co-aventure !
 
Le Mague : Je constate et j’apprécie que ce festival fonctionne en mode de gratuité. Comment avez-vous réussi cette prouesse à ouvrir à tous les habitants sans distinction les arcanes de la culture, dans un esprit de fête, de convivialité et de grand partage ? Quelle est votre recette et votre mode de fonctionnement ?

Virginie Dumas Coulon : L’accès aux spectacles est encore limité au cœur du Médoc et il faut se rapprocher de la CUB (Communauté urbaine de Bordeaux) pour avoir une variété de propositions. Le festival prend le contre-pied de ce constat et l’itinérance permet d’apporter des spectacles sur les places des villages, au plus près des habitants. La gratuité est indispensable à la proximité recherchée. Il faut donc obtenir des budgets, monter des dossiers de demande de subventions et convaincre les décideurs. Pour l’instant, la Communauté des Communes Cœur Médoc prend à sa charge la plus grande partie du financement sous forme de subvention et cette année, la CAF (Caisse d’allocation familale) nous soutient également. Le montage financier est un travail de longue haleine qui demande de la persévérance ! La gratuité est possible aussi grâce aux bénévoles qui se mobilisent en amont et/ou pendant le festival et au soutien des municipalités et des services techniques des différentes communes. L’ensemble des animations et spectacles est gratuit mais une participation libre du public est possible…souhaitée…et nécessaire ! A la hauteur des moyens de chacun, on donne dans la « boîte à don », on apporte des mets et boissons à partager, on donne un coup de main,…

Le Mague : Autre point remarquable et très rare, même les tout-petits sont invités à participer à diverses activités et ateliers. Vous pouvez nous en parler ?

Virginie Dumas Coulon : Encore une fois, c’est grâce au partage des idées avec les partenaires et les bénévoles qu’on a réussi cette année à ouvrir le festival aussi aux tout-petits et particulièrement grâce à l’aide de Fanny Audard, directrice du Réseau des Assistantes Maternelles. Plusieurs spectacles s’adressent en particulier aux tout-petits comme « Les p’tits Lus » ou « Loup y es-tu ? » par la conteuse Laetitia Rapin et d’autres sont pour tous à partir de 3 ou 4 ans comme « Mario » une marionnette facétieuse à taille humaine manipulée par un duo, ou bien encore « Cendrillon mène le bal » et « Blanche Neige », versions revisitées sauce rock’n’roll…qui raviront les petits et les grands !

Le Mague : Dans le même état d’esprit, en dehors du festival et durant l’année vous ouvrez les portes de la culture et de la création aux scolaires. Comment cela se déroule ?

Virginie Dumas Coulon : Il y a aussi des projets (scolaires ou pas) qui sont créés en amont et sont valorisés pendant le festival : création d’un livre vidéo avec une classe de la MFR (Maison Familiale et Rurale) de St Trélody, mise en scène avec une comédienne de lectures à haute voix, réalisation de 2 films courts « Au Fil des Parents » et « Au Fil des Enfants » par des bénévoles du RAM (Réseau des Assistantes Maternelles) et avec les habitants,… Certains ateliers de l’association apportent leur contribution en proposant une expo « La couleur des Mots », une pièce de théâtre « Embouteillages » et des moments de danse. Les équipes des ALSH (Accueil de Loisirs sans Hébergement) se mobilisent et proposent aux enfants de participer en préparant des expos autour des mots sous la direction d’artistes plasticiens locaux, Daniel Gapin et Thierry Audibert. Ce joyeux mélange permet d’associer les habitants à des artistes professionnels et amateurs dans des projets tout au long de l’année. Les projets sont différents à chaque édition car ils naissent de nouveaux échanges, de nouveaux besoins, de nouvelles idées et envies…

Le Mague : Thierry Audibert, je le connais et lui ai déjà consacré une longue interview. Quant à Daniel Gapin, je l’ai rencontré il y a peu et je lui donnerai également bientôt la parole. Avant de vous souhaiter un bon festival des mots 2013 et vous remercier vous et toute votre équipe pour le travail que vous avez fourni de longs mois durant pour préparer ce festival, si vous avez quelque chose à rajouter, je vous écoute avec grand plaisir.

Virginie Dumas Coulon : Nous espérons encore développer l’implication et la participation des habitants du territoire lors des prochaines éditions car Au Fil des Mots est un festival qui se veut participatif… Alors, si le cœur vous en dit, rejoignez-nous pour construire la prochaine étape… J’aimerai aussi vivement glisser un petit remerciement à tous les bénévoles sans qui rien ne serait possible, les partenaires qui suscitent l’émulation et l’agence l’Apostrophe (photos et communication visuelle) pour sa gentillesse et sa réactivité !